Ce que dit l'article et qui semble un problème extrêmement grave, c'est que si Firefox est voué à "disparaître" - c'est-à-dire à voir le part des internautes qui l'utilisent diminuer - ce n'est pas en raison de ses qualités ou défauts, c'est parce que les entreprises comme Google ou Facebook sont en train de réaliser leur objectif final : s'accaparer le net dans sa totalité. Déjà, un grand nombre d'usagers connectés confond "aller sur le net" et "aller sur facebook" - et leur seul point d'accès au net, c'est google ou facebook, autrement dit, ils n'ont accès qu'à ce qui, de la masse totale des données accessibles sur le net, est pré-filtré par ces ensembles logiciels. Google fournit pour bon nombre de gens la totalité des applications dont ils sont besoin - quelle nécessité dès lors à installer des "logiciels tiers" selon la délicate expression de Microsoft ou Apple ? la clé de la réussite aura évidemment été "la vente liée" qui ne laisse aucune chance dans l'avenir aux logiciels libres.
On est à des années lumières du web dont j'ai rêvé quand il y a une vingtaine d'années, on imaginait cet espace immatériel comme un espace de liberté, de pratiques alternatives, d'anarchie réalisée (cf. par exemple les textes militants d'Hakim Bey :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Hakim_Bey ). Dès lors que les connexions internet ont gagné en débit, autour des années 2005-2006, le marché s'est emparé de la toile et l'a transformé en hypermarché géant, voire pire, en un écran sur lequel défilent des pubs dans tous les sens, et au milieu duquel, éventuellement, l'usager peut "faire" un truc qui lui paraît utile, les états ont compris qu'en favorisant la connexion du plus grand nombre, ils pouvaient exercer une surveillance et un contrôle accru des opinions. (ça me fait penser à un article lu ce matin sur la manière dont le gouvernement chinois piste les résistants ouïghour en suivant leur smartphones :
http://www.numerama.com/politique/278975-pekin-renforce-sa-pression-sur-les-ouighours-en-traquant-leurs-smartphones.html ), et les entreprises spécialisées dans la collecte, le croisement et la revente de data (à commencer par les GAFA : Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft, Yahoo, Twitter, LinkedIn et d'autres.) s'en donnent à cœur joie (avec en tête des projets qui n'ont plus grand chose à voir avec le web mais qui visent à déployer des réseaux d'objets et de corps connectés (à des fins extrêmement lucratives bien entendu)).
Les usagers évidemment, parce que c'est "confortable" (comme disait Korben l'autre jour dans un article), ne voient pas l'utilité de "se prendre la tête" en installant Firefox et encore moins Linux. La connaissance même d'un monde qui s’appelle Linux, ou du concept de logiciel libre, a me semble-t-il régressé depuis dix ans. Et quand on évoque les risques liés à la constitution de monopole d'une poignée d'entreprise sur le net tout entier, la majorité des auditeurs pensent que c'est juste de la parano, ou bien que c'est comme ça, on n'y peut rien, et retourne mater des vidéos de merde sur son smartphone.
Tant qu'il y aura des devs linuxiens et des serveurs sous linux, tant qu'on aura encore des ordis dans les bureaux, et pas seulement des smartphones ou des services cloud, je ne pense pas que le logiciel libre "disparaisse", et donc pas non plus les applis de Mozilla ou les applis du libre. Mais ça restera j'en ai peur un truc pour des gens comme vous et moi, un peu bidouilleurs quand même. Bref, l'avenir me paraît particulièrement sombre. Et ça n'a rien à voir avec l'ergonomie du bureau linux ou la vitesse de traitement des données par Firefox